Les personnes LGBTI présentant un risque plus important de développer des troubles mentaux que les personnes hétérosexuelles, il est important de savoir comment les accompagner, comment les soutenir sans discrimination et stigmatisation, deux sentiments vécus par la communauté depuis toujours. Non-seulement les personnes LGBTI sont plus enclines à être victime d'isolation, de rejet et de discrimination dans la société – il est aussi important de rappeler que cette stigmatisation s'étend à travers tout le corps médical. En effet, la médecine est encore à ce jour largement marquée par le patriarcat et l'homophobie. Il faut donc déconstruire ces stéréotypes et préjugés qui poussent à la marginalisation et mettre en lumière les erreurs du passé pour pouvoir effectuer une bonne prise en charge des patients LGBTI.
Plusieurs études ont montré qu'un soutien social et médical aidés les personnes LGBTI. En effet, les jeunes trans ayant transitionné socialement présentent une santé mentale similaire aux enfants cisgenres (Durwood et al, 2016), ce qui prouve que le support social et médical des jeunes trans peut améliorer leur santé mentale et baisser le taux de suicide élevé chez cette population. En effet, les trans ayant bénéficié d'un bloqueur de puberté ont moins de 30% de risque d'idéations suicidaires (Turban et al, 2020).
Il est donc primordial, dans le but de soutenir les personnes de la communauté LGBTI, de savoir comment les suivre, les accompagner en thérapie. Il est aussi important de se mettre à la page : en plus de l'avancée des pratiques psychologiques, les connaissances sur la sexualité et l'identité de genre ont pu amener une vision plus moderne du genre, auparavant décrit de manière très binaire par le corps médical. Les demandes des patients sont en mutation, il faut donc rapidement s'adapter.
Par exemple, le modèle classique de transgenre appelé auparavant « transexuel » qui impliquait donc un changement au niveau du sexe biologique a été analysé pour en venir en conclusion que les transgenres n'étaient pas forcément tous en recherche de réassignation chirurgicale de sexe mais plutôt qu'ils avaient une image fluide des genres. Ces changements entraînent, par rebond, des modifications également dans les pratiques thérapeutiques. Les personnes demandent moins de « changer de sexe » et demandent aussi moins de chirurgies reconstructives. Le problème qui semble apparaitre en premier est l'image sociétale, de pouvoir vivre en paix dans la société, sans jugement ni discrimination. Les nouveaux comportements et nouvelles demandes allant dans le sens de la variété du genre appellent à une approche plus individualisée, centrée sur le sujet, plutôt que l'application d'un protocole standardisé de réassignation sexuelle et d'aide psychologique à travers la transition. Le rôle du thérapeute est donc aussi en changement, en perpétuelle évolution. Le patient attend un soutien dans l'acceptation de soi.
Accepter toutes les expériences individuelles, les ressentis, sans forcément parler de transition. Accepter la fluidité est devenu un des points primordiaux du soutien médical et thérapeutique.
Pour bien accompagner les personnes LGBTI, il faut donc penser inclusivement, penser différemment. Les pratiques telles que la thérapie centrée sur la personne, la sexologie constructiviste, ainsi que les nombreuses formations pour se spécialiser aux traumatismes vécus par les LGBTI sont tous des avancées récentes dans le monde médical et de la psychologie qui peuvent nous permettre à toutes et tous de recevoir des patients en étant éduqué, informé et formé.
L'impact d'un mauvais support social et médical sur la santé psychique montre l'importance de lutter contre les discriminations et les LGBTIphobies de manière structurelle et transversale, en passant évidemment par le corps médical et plus particulièrement par les professionnels de santé mental qui ont pendant longtemps induits ou empirés les traumatismes vécus par les personnes concernées.
Ainsi il est nécessaire d'améliorer la prise en charge des personnes LGBTI confrontées à des difficultés psychologiques. Une approche intersectionnelle permettrait en outre d'appréhender les problèmes de santé mentale reliés aux facteurs socio-économiques qui renvoient simultanément au genre, à la classe sociale et à l'appartenance ethno-raciale. La question des discriminations que subissent les personnes concernées, notamment dans l'accès à l'emploi et aux soins, à travers la violence quotidienne, devrait aussi être prise en compte, pour mieux appréhender la dimension structurelle de la santé mentale.
De manière générale, la santé mentale mérite d'être investiguée davantage en lien avec la sexualité et le genre. Si prendre en compte la question du genre en médecine est importante, nous pouvons en conclure que prendre en compte la non-conformité de genre ainsi que l'orientation sexuelle permettrait d'avoir connaissance de tous les facteurs socioculturels qui influencent nos patients et donc favorisait une meilleure prise en charge.
Chloé ROSATI,
Psychopraticienne
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